Une commune peut-elle être contrainte de verser l’allocation chômage à un agent contractuel démissionnaire alors qu’elle n’est pas son dernier employeur ?

OUI : lorsqu’un agent a, après avoir quitté volontairement un emploi, retrouvé un autre emploi dont il a été involontairement privé, il a droit à une indemnisation au titre de l’assurance chômage dès lors qu’il a travaillé au moins quatre-vingt-onze jours ou quatre cent cinquante-cinq heures dans ce dernier emploi et que, d’autre part, dans cette hypothèse, la détermination de la personne à laquelle incombe la charge de l’indemnisation dépend de la question de savoir quel est l’employeur qui, dans la période de référence prise en compte pour l’ouverture des droits, l’a employé pendant la période la plus longue. Aujourd’hui, en octobre 2020, si l’agent involontairement privé d’emploi a précédemment volontairement quitté un emploi, il ne pourra prétendre au bénéfice d’allocations chômage qu’à condition de pouvoir justifier, postérieurement au départ volontaire, d’au moins 65 jours travaillés ou 455 heures travaillées.


Aux termes de l’article L.5422-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige : « Ont droit à l’allocation d’assurance les travailleurs involontairement privés d’emploi (…), aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure ».

Aux termes de l’article L.5424-1 du même code : « Ont droit à une allocation d’assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : / 1° Les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l’Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ainsi que les militaires (…) ».

Il résulte de ces dispositions ainsi que de celles des articles L. 5422-2, L. 5422-3 et L. 5422-20 du même code que les agents publics involontairement privés d’emploi ont droit à une allocation d’assurance dans les conditions définies par l’accord prévu par l’article L. 5422-20, dès lors qu’un tel accord est intervenu et a été agréé et qu’il n’est pas incompatible avec les règles qui gouvernent l’emploi des agents publics.

Aux termes de l’article 2 du règlement général annexé à la convention du 14 mai 2014 relative à l’indemnisation du chômage, agréée par arrêté du 25 juin 2014 : « Sont involontairement privés d’emploi ou assimilés, les salariés dont la cessation du contrat de travail résulte : (…) / – d’une fin de contrat de travail à durée déterminée, dont notamment le contrat à objet défini, ou de contrat de mission ; (…) ».

L’article 4 du même règlement général prévoit que : « Les salariés privés d’emploi justifiant d’une période d’affiliation comme prévu aux articles 3 et 28 doivent : (…) e) N’avoir pas quitté volontairement, sauf cas prévus par un accord d’application, leur dernière activité professionnelle salariée, ou une activité professionnelle salariée autre que la dernière dès lors que, depuis le départ volontaire, il ne peut être justifié d’une période d’affiliation d’au moins 91 jours ou d’une période de travail d’au moins 455 heures (…) ».

Aujourd’hui, en octobre 2020, si l’agent involontairement privé d’emploi a précédemment volontairement quitté un emploi, il ne pourra prétendre au bénéfice d’allocations chômage qu’à condition de pouvoir justifier, postérieurement au départ volontaire, d’au moins 65 jours travaillés ou 455 heures travaillées.

Aux termes de l’article R.5424-2 du code du travail : « Lorsque, au cours de la période retenue pour l’application de l’article L. 5422-2, la durée totale d’emploi accomplie pour le compte d’un ou plusieurs employeurs affiliés au régime d’assurance a été plus longue que l’ensemble des périodes d’emploi accomplies pour le compte d’un ou plusieurs employeurs relevant de l’article L. 5424-1, la charge de l’indemnisation incombe à [Pôle emploi] pour le compte de l’organisme mentionné à l’article L. 5427-1. / Dans le cas contraire, cette charge incombe à l’employeur relevant de l’article L. 5424-1, ou à celui des employeurs relevant de cet article qui a employé l’intéressé durant la période la plus longue ».

Il résulte de ces dispositions que, d’une part, lorsqu’un agent a, après avoir quitté volontairement un emploi, retrouvé un autre emploi dont il a été involontairement privé, il a droit à une indemnisation au titre de l’assurance chômage dès lors qu’il a travaillé au moins quatre-vingt-onze jours ou quatre cent cinquante-cinq heures dans ce dernier emploi et que, d’autre part, dans cette hypothèse, la détermination de la personne à laquelle incombe la charge de l’indemnisation dépend de la question de savoir quel est l’employeur qui, dans la période de référence prise en compte pour l’ouverture des droits, l’a employé pendant la période la plus longue.

Il résulte de l’instruction que Mme B… a été employée par la société ASF plus de quatre-vingt-onze jours après qu’elle a quitté volontairement son emploi auprès de la commune d’Avion, qu’elle s’est trouvée sans emploi quand son contrat à durée déterminée avec la société ASF a pris fin et qu’au cours de la période de référence de vingt-huit mois applicable en l’espèce en vertu de la convention relative à l’indemnisation du chômage, elle n’a pas été employée plus longtemps par un autre employeur que par la commune d’Avion.

Elle remplissait en conséquence les conditions posées par les dispositions mentionnées aux points 5 et 6 pour bénéficier du versement de l’allocation d’aide au retour à l’emploi, à la charge de la commune d’Avion.

Contrairement à ce que soutient cette dernière, la circonstance que Mme B… a démissionné de son emploi d’agent public alors qu’elle avait déjà conclu un contrat de travail avec un employeur privé est sans incidence sur sa qualité de travailleur involontairement privé d’emploi, qui s’apprécie au regard des seules conditions dans lesquelles a été exercé et quitté le dernier emploi occupé, et ne fait pas obstacle à ce que soit prise en compte, pour la détermination du débiteur de l’allocation, la période pendant laquelle elle a travaillé pour la commune d’Avion.

Par suite et dès lors qu’il n’est pas contesté qu’elle remplissait à la date de sa demande les autres conditions auxquelles est subordonné l’octroi de l’allocation d’aide au retour à l’emploi, Mme B… est fondée à demander à la commune d’Avion de lui verser cette allocation.

 Il y a dès lors lieu d’annuler la décision du 28 juillet 2015 rejetant cette demande ainsi que celle du 2 octobre 2015 rejetant le recours gracieux de Mme B….

En revanche, l’état de l’instruction ne permettant pas de déterminer, conformément à la convention relative à l’indemnisation du chômage, le montant de l’allocation, la date d’ouverture des droits, compte tenu du délai d’attente et d’un éventuel différé d’indemnisation ni la durée du versement, Mme B… doit être renvoyée devant la commune d’Avion pour que soient calculées et versées, dans un délai de trois mois, les allocations qui lui sont dues, le cas échéant compte tenu des sommes déjà versées par la commune en exécution du jugement annulé. Il n’y a, en outre, pas lieu de prononcer à l’encontre de la commune l’injonction sous astreinte demandée par Mme B….

SOURCE : Conseil d’État, 3ème chambre, 29/07/2020, 430947, Inédit au recueil Lebon

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