Un praticien hospitalier insuffisant professionnel doit-il être avisé de la réunion de la CME et mis en mesure de présenter ses observations ?

NON : dans un arrêt en date du 26 avril 2018, le Conseil d’Etat précise qu’en jugeant qu’il ne résultait ni des dispositions de l’article R.6152-628 du code de la santé publique, ni d’aucune autre disposition en vigueur, ni d’aucun principe général que le praticien attaché associé qui fait preuve d’insuffisance professionnelle devrait être avisé de la réunion de la commission médicale d’établissement (CME), être mis en mesure de présenter ses observations devant elle et avoir communication des éléments soumis à la commission.

Mme B…, docteur en pharmacie, a été recrutée en qualité de praticien attaché associé dans le service de pharmacie à usage intérieur des hôpitaux universitaires La Pitié Salpêtrière-Charles Foix, à compter du 1er janvier 2012, sous couvert d’un contrat prolongé à plusieurs reprises et, en dernier lieu, pour une durée de trois ans à compter du 1er janvier 2014.

Par une décision du 1er décembre 2014, prise après consultation de la commission médicale d’établissement locale (CMEL), le directeur des hôpitaux universitaires La Pitié Salpêtrière-Charles Foix a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Par un jugement du 13 juillet 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l’annulation pour excès de pouvoir de cette décision ; que, par un arrêt du 24 janvier 2017, contre lequel Mme B… se pourvoit en cassation, la cour administrative de Paris a rejeté son appel dirigé contre ce jugement.

Aux termes des trois premiers alinéas de l’article R.6152-628 du code de la santé publique : «  L’insuffisance professionnelle consiste en une incapacité dûment constatée du praticien à accomplir les travaux ou à assumer les responsabilités relevant normalement des fonctions de praticien attaché./ L’intéressé est avisé par lettre recommandée du directeur de l’établissement avec demande d’avis de réception de l’ouverture d’une procédure d’insuffisance professionnelle. Il reçoit communication de son dossier et est mis à même de présenter ses observations orales et écrites avec l’assistance d’un défenseur de son choix./ Le praticien attaché ou praticien attaché associé qui fait preuve d’insuffisance professionnelle fait l’objet soit d’une modification de la nature de ses fonctions, soit d’une mesure de licenciement avec indemnité. Ces mesures sont prononcées par le directeur de l’établissement après avis de la commission médicale d’établissement ou, le cas échéant, de la commission médicale d’établissement locale. »  »

Le principe général des droits de la défense implique que la personne concernée par une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle, après avoir été informée des insuffisances qui lui sont reprochées, soit mise à même de demander la communication de son dossier et ait la faculté de présenter ses observations devant l’autorité appelée à prendre la décision.

Lorsque les dispositions applicables se bornent à prévoir que cette autorité recueille l’avis d’une instance consultative, le principe des droits de la défense n’exige pas que cette instance entende l’intéressé mais seulement que ses membres aient, préalablement à leur délibération, communication des observations qu’il a pu présenter devant l’autorité compétente.

Les dispositions de l’article R.6152-628 du code de la santé publique cité ci-dessus prévoient, d’une part, que le praticien hospitalier est avisé par lettre recommandée du directeur de l’établissement avec demande d’avis de réception de l’ouverture d’une procédure d’insuffisance professionnelle, reçoit communication de son dossier et est mis à même de présenter ses observations orales et écrites avec l’assistance d’un défenseur de son choix et, d’autre part, que le licenciement est prononcé par le directeur de l’établissement après avis de la commission médicale d’établissement prévue par l’article L. 6144-1 du code de la santé publique ou, le cas échéant, de la commission médicale d’établissement locale.

Dans son arrêt en date du 26 avril 2018, le Conseil d’Etat considère qu’en jugeant qu’il ne résultait ni des dispositions de cet article, ni d’aucune autre disposition en vigueur, ni d’aucun principe général que le praticien attaché associé qui fait preuve d’insuffisance professionnelle devrait être avisé de la réunion de la commission médicale d’établissement, être mis en mesure de présenter ses observations devant elle et avoir communication des éléments soumis à la commission, la cour administrative d’appel de Paris, qui n’a pas omis de répondre au moyen tiré de l’irrégularité de la procédure, n’a pas commis d’erreur de droit.

En jugeant qu’il ne ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis ni que la modification de la nature des fonctions de Mme B… n’aurait pas été envisagée par son employeur, ni que l’appréciation portée par l’administration sur les compétences professionnelles de l’intéressée était erronée, la cour administrative d’appel, qui a suffisamment motivé son arrêt, a porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine, exempte de dénaturation.

Le licenciement pour insuffisance professionnelle n’ayant pas le caractère d’une sanction, Mme B… ne peut utilement soutenir que la cour aurait dû lui donner cette qualification et examiner s’il était proportionné aux faits qui le justifiaient.

SOURCE : Conseil d’État, 5ème et 6ème chambres réunies, 26/04/2018, 409324

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